Des Docteurs à l’affiche du conseil génétique
La Newsletter des conseillers en génétique change de nom ! Désormais nous la baptiserons la CG-News’.
Ca y est, déjà 3 docteurs en conseil génétique en France. Depuis 2012, déjà 3 diplômés dans cette spécialité médicale. L’EDSVS de l’Université Aix-Marseille a diplômé cette année ses premiers docteurs en conseil génétique. Le ‘Master pro’ pathologie humaine est le seul master professionnel autorisant la poursuite d’étude vers une thèse en France. En Europe également, ce Master est le seul à appartenir à un cursus LMD. Un pas en avant dans la visibilité de la profession et la considération de ces diplômés dans l’exercice de leur fonction. L’importance de ces thèses dans la reconnaissance du métier a été soulevée par un des membres du Jury d’une soutenance de doctorat de conseil génétique, le Professeur Alain Calender (Service de Génétique Moléculaire et Médicale – Hôpital Edouard Herriot – Lyon) :
« A l’interface des consultations de suivi clinique et de la prise en charge des familles prédisposées par le généticien, le conseiller en génétique établit un lien essentiel pour optimiser les informations collectées sur la pathologie au sein d’une famille. De la constitution des arbres généalogiques, jusqu’à la définition précise des lésions observées chez les différentes collatéraux, le conseiller joue un rôle de régulateur de l’information nécessaire à la réalisation des analyses moléculaires de dépistage avec un respect total des règles éthiques et du contact humain. A la croisée des actions du médecin, du chirurgien, du psychologue et de tous les soignants concernés par le traitement du cancer, le conseiller en génétique est la personne de référence à qui une famille dans l’inquiétude pourra poser toutes les questions pour mieux comprendre la maladie dans sa composante héréditaire. »
« Elaboration de l’outil EQAD-COG colon (Evaluation et Amélioration de la qualité de prise de Décision lors du Comité d’Oncogénétique multidisciplinaire dans le cadre de prédisposition héréditaire au cancer colorectal) – Une expérience française » Souria AISSAOUI
Lien de l’article : http://link.springer.com/article/10.1007/s12687-013-0167-8
« Estimation des risques de cancer du sein et de l’ovaire des femmes sans mutation des gènes BRCA1 et BRCA2 : apport des modèles de calcul de risque » Antoine de Pauw
Lien de l’article : http://www.jle.com/e-docs/00/04/4F/CF/article.phtml
Enfin, la 3ème thèse sera soutenue le 20 Novembre à Strasbourg, et est intitulée : insertion professionnelle et intégration des conseillers en génétique : une nouvelle coopération dans le domaine de la santé (C.Cordier).
Par Dr Souria Aissaoui
Comité de relecture : Pr Alain Calender (Service de génétique moléculaire et médicale, HCL), Docteur Juliette Albuisson (Service de génétique, HEGP), Dr Marie-Pierre Cordier (CPDPN Hôpital Femme Mère Enfant, HCL), Dr Gilles Millat (Cardiogénétique moléculaire et Responsable plateforme NGs-diagnostic, HCL), Dr Gylna Loko, Dr Perrine Malzac
Mise en page : Thomas Seytier.
Information de la parentèle : synthèse sur le décret n°2013-527
L’information de la parentèle de personnes atteintes de maladie génétique a été abordée dans la loi de bioéthique de juillet 2011.
Lors de la précédente newsletter au printemps 2013, le décret d’application de la loi avait été validé par le Conseil d’Etat et devait être signé par le gouvernement.
C’est chose faite le 20 juin 2013 avec la parution du décret n°2013-527 relatif aux conditions de mise en œuvre de l’information de la parentèle dans le cadre d’un examen des caractéristiques génétiques à finalité médicale.
A travers cet article, la newsletter va donc essayer de relater une consultation-type de génétique une fois le décret en application (c’est à dire depuis le lendemain de sa parution, le 21 juin 2013…) et de passer en revue les différentes réunions d’information et les différents retours et travaux du monde de la génétique française à ce sujet.
Ce texte fixe donc, entre autres, les modalités d’information aux apparentés. Ilstipule que préalablement à la réalisation d’un examen de ses caractéristiques génétiques, la personne doit être informée de son obligation, dans le cas où une anomalie génétique grave serait diagnostiquée chez elle, d’informer les membres de sa famille potentiellement concernés dès lors qu’il existe des mesures de prévention ou de soins.
Lors de la première consultation, le médecin généticien devra donc dresser en compagnie du patient une liste des personnes potentiellement concernées devant être informées.
A partir de là, 3 possibilités s’offrent donc au patient :
– le patient peut choisir d’informer lui-même ses apparentés. Il le signera.
– s’il ne souhaite pas informer lui-même ses apparentés, il peut consentir à ce que le médecin généticien transmette l’information à sa parentèle. Il le signera.
– enfin le patient peut choisir de ne pas informer ses apparentés et engage alors sa responsabilité civile. Il le signera.
Un document écrit signé par le patient et le médecin, appelé à rester dans son dossier médical, prévoira donc le choix de la modalité d’information à la parentèle.
L’information de l’obligation de transmission de l’information à la parentèle sera donnée dès la 1ère consultation. Puis, lors de la consultation de rendu de résultat, en cas de diagnostic d’une anomalie génétique, le médecin généticien communique le résultat de l’examen à la personne puis lui remet un document résumant cette information de manière loyale, claire et appropriée. Il remet également au patient la liste des membres à informer potentiellement concernés.
Le décret stipule que lorsque la personne ne souhaite pas informer elle-même les membres de sa famille potentiellement concernés, le médecin porte à la connaissance de ces personnes, par lettre recommandée, l’existence d’une information médicale à caractère familial susceptibles de les concerner.
Le modèle de lettre fixé par l’arrêté du 20 juin 2013 du ministère de la santé est en quelque sorte un mélange de plusieurs modèles de lettres élaborées par les différentes sociétés savantes sollicitées par l’Agence de Biomédecine au printemps 2012, dont fait partie l’AFCG.
Une fois la lettre recommandée d’information envoyée, le médecin consulté par la personne apparentée au cas index l’ayant reçue se rapproche du médecin prescripteur qui l’a adressée afin d’obtenir l’information relative à l’anomalie génétique en cause chez le proposant.
Le médecin prescripteur, quant à lui, ne transmet que l’information relative à l’anomalie génétique en cause, à l’exclusion de toute autre information couverte par le secret médical, et notamment l’identité de la personne chez qui l’anomalie génétique a été diagnostiquée.
Enfin, une nouvelle notion, celle du don de gamètes, va venir s’intégrer à notre pratique dès la première consultation, préalable au test génétique. En effet, le décret préconise le fait que le médecin prescripteur doive interroger la personne sur l’existence éventuelle de sa part d’un don de gamètes. Il informe la personne qu’il peut, avec son autorisation, porter à la connaissance du responsable du centre de Procréation Médicalement Assistée l’existence d’une anomalie génétique afin que celui-ci procède à l’information des personnes nées du don. Lorsque la personne y consent, elle donne par écrit au médecin prescripteur, qui en atteste, l’autorisation d’informer le responsable du centre de PMA.
1ère consultation
•Information de l’obligation d’informer ses apparentés •Établir une liste des personnes potentiellement concernées •Choix de la modalité d’information |
2e consultation et 3e consultations (rendus de résultat)
•Communication du résultat à l’oral puis à l’écrit •Le patient informe ses apparentés OU •Le médecin, suite à la demande écrite du patient, doit s’en charger |
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Comme nous l’avons tous constaté, ce texte de loi amène plusieurs nouveautés dans notre pratique courante de consultation.
Depuis quelques mois, les différentes sociétés savantes se réunissent afin de faire le point entre elles et d’essayer d’homogénéiser leur pratique de consultation.
Plusieurs journées ou demi-journées ont été organisées en ce sens, parmi lesquelles (liste non-exhaustive) :
•Au cours du 3e jeudi de Necker du mois de septembre 2013, Mme Pascale Lévy, référente génétique au sein de l’Agence de Biomédecine et Me Marie Grosset, juriste au Conseil d’Etat, ont pris la parole pour, entre autres, expliquer ce qui a motivé la création de ce texte de loi mais aussi la marche à suivre lors des consultations de génétique.
•La Réunion du Groupe Génétique et Cancer (GGC) du 3 octobre 2013 a invité le Docteur Laurent Pasquier, médecin généticien clinicien au CHU de Rennes et très au fait de l’aspect juridique de la génétique de par sa formation. Il a détaillé les tenants et les aboutissants du décret n°2013-527 de façon très claire et pédagogique.
•Colloque sur le cancer du sein à Montpellier. Cette riche journée du 27 Septembre dernier reprend tous les éléments décrits précédemment, éléments débattus dignement entre différents spécialistes experts du corps médical. Il y a été confronté un dilemme moral lié à cette information à la parentèle. Doit-on appliquer (moralement et éthiquement) cette loi devenue (juridiquement) obligatoire ? Oui en plaidant la non-assistance à personne en danger ? non en affichant un texte qui irait contre le consentement et l’autonomie du patient (cas index) et de la famille (droit de ne pas savoir) ? les répercutions liées à ce texte demeurent bien complexes…
Durant ces journées, il est clairement apparu que les différents services de génétique sont mobilisés afin de trouver un consensus sur la « bonne » attitude à adopter lors des consultations.
Plusieurs équipes ont d’ores et déjà travaillé sur le sujet, en formant des groupes de réflexion. C’est notamment le cas du groupe composé de 6 conseillers en génétique (Emmanuelle Haquet, Laetitia Monteil, Christophe Cordier, Nicolas Tarin, Linda Akloul et Cécile Zordan) et du Dr Pasquier. Ensemble, ils ont élaboré un questionnaire axé sur la compréhension de la lettre fixée par arrêté par le législateur, les sentiments qu’elle peut susciter ainsi que la volonté d’y donner suite.
Les conclusions de cette étude, ainsi que celles des études menées par plusieurs autres équipes, seront données lors des 7e Assises de Génétique à Bordeaux.
A cette occasion, nous y verrons sans doute plus clair sur un éventuel consensus national entre tous les services de génétique quant à l’attitude et les documents à adopter en consultation au moment d’aborder la question de la transmission de l’information à la parentèle.
Par Jean-Michaël Mazzella
Deux cas de mise en place de circuit d’information des patients, démarche faisant partie intégrante de leur accompagnement
Réunion d’information sur le dépistage de la trisomie 21
Depuis un peu plus de deux ans maintenant, des réunions d’information sur le dépistage de la trisomie 21 sont assurées tous les 15 jours au CPDPN de l’Hôpital Femme Mère Enfant, à Lyon.
Il semblait effectivement que beaucoup trop de couples encore se soumettaient à ce dépistage sans en connaître réellement les enjeux et limites, les médecins et sages-femmes n’ayant peut-être pas suffisamment de temps à y consacrer lors de leur consultation médicale déjà bien chargée. Le but de ces réunions est donc de les informer, en début de grossesse, sur ce dépistage afin de les aider dans leur prise de décision.
Les patientes s’inscrivant à la maternité en tout début de grossesse, reçoivent automatiquement une fiche d’information contenant les dates des réunions. Elles viennent ensuite de façon libre, sans prise de rendez-vous, souvent accompagnées de leurs conjoints (voire parfois seuls les conjoints viennent !). Elles reçoivent des informations détaillées sur la Trisomie 21, le dépistage, ses résultats, les tests de diagnostic prénatal qui peuvent en découler, les enjeux éthiques, les techniques actuelles et futures… Elle sont ainsi sensibilisées et encouragées à prendre le temps d’une réflexion en couple avant de choisir de bénéficier ou non de ce dépistage. Elles repartent avec une lettre de synthèse et les coordonnées du CPDPN si besoin. Toutes les questions sont les bienvenues et certains patients sont revus par la suite en consultation pour plus d’information ou évoquer des antécédents familiaux.
Le retour des patients est toujours très positif ainsi que celui des médecins et sages-femmes qui peuvent ainsi « gagner du temps » lors de leur consultation médicale …
Par Audrey Vichier
Une association de patients et de familles pour renforcer les actions de communication et d’information sur la DREPANOCYTOSE EN MARTINIQUE
La Martinique est un petit département ultra-marin de 400 000 habitants issus des migrations des populations africaines, caucasiennes et asiatiques. Dans ce département, 1 personne sur 10 est porteuse du trait drépanocytaire. La drépanocytose, pathologie causée par une altération qualitative de l’hémoglobine, est la première maladie génétique au monde. En Martinique, elle concerne près de 2000 personnes. Il existe un centre de référence scindé en 2 pôles : adultes et enfants.
Dans ces centres, les consultations de conseil génétique sont rares. Malgré la mise en place du dépistage néonatal dans les années 80, les malades sont encore diagnostiqués de façon fortuite et le conseil génétique est souvent donné en cours de grossesse à un terme souvent avancé, alors que les obstétriciens prescrivent des génotypages d’hémoglobine pour origine ethnique.
Le nombre d’Interruptions Médicales de Grossesse pour fœtus atteint de drépanocytose est constant tandis que le nombre de naissance involontaire d’enfants atteints varie d’une année à l’autre, sans que l’on puisse affirmer que les chiffres bas soient associés à une prise de conscience.
Tout près de la Martinique, Département Français d’Amérique, l’histoire des moyens mis en œuvre pour comprendre et lutter contre la drépanocytose aux USA est très imbriquée avec l’histoire de la communauté noire. Longtemps considérée comme une maladie de l’ethnie noire, la drépanocytose est encore aujourd’hui la maladie de l’exclusion. Elle est souvent mal comprise de l’entourage et reste parfois ignorée de la population générale. Ainsi, malgré sa prévalence sur le territoire, il semble indispensable de faire connaître la maladie et les risques de transmission qui y sont associés. Pour cela, il faut sensibiliser la population générale et faire parler les patients.
C’est pour cela que, afin de renforcer l’action du centre de référence au niveau de la communication et de l’information sur la drépanocytose, une jeune association de patients et de familles a vu le jour. Il s’agit de VIV’ASC patients, familles, drépanocytose ; prononcer « vivace ». Cette association loi 1901 aux sonorités de « vigueur » et rappelant certaines lettres de l’hémoglobine (A, S ou C) a pour objectif de faire connaître la maladie, aider les patients et leur famille dans leur quotidien et dans leur prise en charge, proposer des activités de loisirs et toutes autres actions en lien avec la drépanocytose.
Elle doit participer à l’édification d’un réseau ville-hôpital et devrait contribuer à promouvoir le conseil génétique et le dépistage avant la grossesse.
Coordonnées : VIV’ASC patients, familles, drépanocytose
Mail : Asso.vivasc@gmail.com
0696393569, 0696224488
Par Anna-Gaëlle Valard
A propos d’un article récent : Recommandations de l’European Society of Human Genetics (ESHG) concernant le séquencage du génome entier en pratique clinique
C.G. van El et al. Whole-genome sequencing in health care. European Journal of Human Genetics (2013) 21, 580-584. http://www.ceg.nl/uploads/algemeen/Van_El_2013_Eur_J_Hum_Genet_WGS_recommendations_ESHG.pdf
Dans le contexte d’une approche diagnostique, les tests génétiques sont le plus souvent ciblés sur l’analyse d’un ou plusieurs gènes connus pour leur implication potentielle. Au cours des dernières années, le coût des techniques de haute résolution par séquençage de nouvelle génération (NGS: Next-Generation Sequencing ou HTS: High-Throughput Sequencing) permettant la détection de mutations sur l’ensemble du génome a fortement baissé. Le séquençage du génome entier (WGS: Whole Genome Sequencing) ou de l’exome (WES: Whole Exome Sequencing) génère de très grandes quantités de données brutes, nécessitant des analyses bioinformatiques complexes pour en extraire des informations utiles aux patients. Selon l’objectif du test, l’analyse peut se focaliser sur le génome entier (WGA: Whole Genome Analysis), l’exome (WEA: Whole Exome Analysis), ou une sélection filtrée de gènes. Différents champs d’applications sont possibles: diagnostic, recherche, pharmacogénétique, dépistages en population…
Les données générées par le séquençage haut débit peuvent révéler des allèles associés à des risques de pathologies qui n’auraient pas été détectés par un test ciblé («unsolicited», « incidental» ou «secondary» findings), ou détecter des variants génomiques dont la signification biologique n’est pas (encore) connue. Comment s’assurer que les résultats générés par ces techniques de haut débit soient analysés de façon appropriée dans l’intérêt clinique des patients ? Le Public and Professional Policy Committee (PPPC) et l’ESHG ont lancé le débat au cours de différents workshops entre 2010 et 2012. Les auteurs de cet article apportent leur contribution à cette discussion en préconisant onze recommandations de bonne pratique pour l’utilisation du séquençage haut débit, principalement dans le champ du diagnostic.
Recommandations
•L’utilisation du WGS/WES implique que les professionnels de santé (recherche et clinique) mettent en place des structures pour partager leurs expériences et établir des recommandations à un niveau local, national et international, prenant en compte l’utilité clinique, le conseil génétique, l’établissement des consentements, la prise en compte des « unsolicited findings » et des variants dont les implications cliniques sont incertaines.
•Lorsque le séquençage ciblé ou l’analyse du génome sont possibles, il est préférable d’utiliser en premier lieu une approche ciblée, afin d’éviter l’obtention de données non interprétables, ou non souhaitées initialement. Dans le cas d’une analyse génome entier (WGA), l’utilisation de filtres après séquençage devrait permettre de limiter l’analyse à des gènes ou groupes de gènes spécifiques, et de sélectionner les variants d’intérêt. Les variants génétiques connus pour avoir une utilité clinique limitée ou nulle devraient être si possible non analysés, ou non signalés.
•L’analyse du génome entier (WGA) nécessite une justification en terme de nécessité (le besoin de résoudre un problème clinique) et un rapport bénéfices / risques favorable pour le patient.
•Lorsque l’utilisation de ces techniques est envisagée, un protocole doit avoir été défini pour la communication aux patients des résultats non attendus. Si la détection d’un tel résultat est corrélée à la probabilité de graves problèmes de santé chez la personne testée ou chez ses apparentés, et pour lesquels un traitement ou des mesures de prévention existent, le résultat de ce variant devrait être rendu par des professionnels de santé.
•Des recommandations pour la formulation du consentement éclairé concernant les tests diagnostiques doivent être établies, afin de permettre au patient de distinguer les différentes catégories de résultats qui peuvent en découler, et de spécifier les informations spécifiques que le patient est en droit de savoir. Le droit de ne pas savoir du patient ne devrait toutefois pas s’opposer aux responsabilités des professionnels si sa santé ou celle de ses proches est en jeu.
•L’utilisation des techniques de séquençage haut débit peuvent avoir des applications croisées entre diagnostic et recherche. Les médecins doivent être conscients de l’importance de donner la priorité à l’intérêt des patients, tout en leur expliquant les retombées potentielles pour le développement des connaissances et les perspectives de recherche. Les consentements devront être adaptés (diagnostic, recherche, résultats, conservation des prélèvements) et si nécessaire modifiés selon les situations.
•Dans le cas des personnes mineures, des recommandations doivent être établies concernant les résultats non attendus: lesquels doivent être dévoilés? Cette question doit prendre en compte l’autonomie et les intérêts de l’enfant, ainsi que les droits et désirs des parents d’être informés ou non pour leur (future) descendance.
•Dans le cas où de nouvelles connaissances scientifiques permettront de réinterpréter les résultats avec un intérêt clinique évident pour le patient, la possibilité de reprendre contact avec lui devra être envisagée, selon des modalités (quand et comment) à définir.
•Une collaboration internationale doit voir le jour pour faciliter l’interprétation des données génomiques, et pour établir des bases de données d’informations génotypiques et phénotypiques.
•Un effort soutenu est demandé aux professionnels pour informer, expliquer et commenter les résultats des tests génétiques de façon appropriée aux patients.
•Les médecins généticiens devraient s’engager à communiquer sur les avancées en génétique, et expliquer les avantages et inconvénients des tests génétiques réalisés dans un cadre médical ou avec un objectif commercial, afin d’encourager les prises de conscience. L’amélioration des connaissances génétiques des patients et du grand public contribuera à impliquer plus largement la société dans ces débats.
Commentaires et conclusions des auteurs
Le séquençage haut débit est une technique de haute résolution qui génère une quantité d’informations à traiter dépassant notre expérience actuelle. Il est donc nécessaire de mettre en place un cadre et des recommandations qui ne doivent pas limiter ou entraver le développement des connaissances, mais qui devront être régulièrement réévaluées dans les années à venir.
Pour établir un diagnostic, il est crucial de savoir si un variant génomique peut-être interprété ou non comme causal d’une pathologie spécifique. Les premières analyses devraient d’abord cibler les gènes en relation prouvée avec l’étiologie de la maladie, tout en sachant qu’une approche initiale trop ciblée peut entraver le processus de diagnostic. Si aucun variant causal n’est détecté, une analyse plus large pourrait être envisagée, en adaptant de façon appropriée le filtre utilisé. En effet un trop grand nombre de résultats non attendus ainsi que de variants non répertoriés peuvent nuire au processus de diagnostic, et a contrario une fenêtre d’analyse trop restrictive peut éliminer des allèles d’intérêt pour le patient.
(Exemple d’analyse filtrée: rechercher uniquement chez un enfant malade les variations génomiques de novo, par comparaison avec les génomes parentaux).
En terme de pathologies, la question n’est pas quelles pathologies inclure dans le test mais quelles pathologies exclure des données WGS/WES par analyse sélective, selon une rigoureuse évaluation de l’utilité clinique. Les protocoles devront être ajustés en lien avec les progrès des connaissances. Le conseil génétique doit permettre d’expliquer, préalablement aux tests, que des données non attendues et des variants de signification inconnue ou incertaine peuvent être décelés.
Dans le cadre de la recherche, il sera important de pouvoir répertorier les variants, documenter les gènes, et permettre que les échantillons biologiques ainsi que l’information soient accessibles à la communauté scientifique par le biais de biobanques et de bases de données sécurisées et régulièrement mises à jour.
D’un point de vue éthique, légal et social, les données génomiques dans un contexte de diagnostic ou de screening de population impliquent de réfléchir à la confidentialité et au secret médical. Par exemple, les données brutes obtenues par WGS doivent elles être stockées, et si oui sous quelles conditions ? Comment faire lorsque les patients ou parents auront indiqué qu’ils ne souhaitaient pas connaitre tous les résultats, alors que certains seront importants pour leur santé, celle de leurs enfants ou apparentés? (cf article information à la parentèle) Le screening néonatal pour détecter des maladies rares* pourrait justifier l’utilisation du WGS/WES avec comme objectif une prévention et/ou une prise en charge précoce dans le cadre d’une médecine personnalisée. Comment procéder alors avec les données concernant des maladies à révélation tardive, ou encore des prédispositions génétiques à certains cancers, qui affecteront l’enfant dans sa vie future? Comment dans ce cas respecter au mieux sa future autonomie et son droit (ou non) de savoir sans le priver d’une information qui peut être vitale, et prendre en compte les risques des membres de sa famille? Dans ce cas les résultats devraient-ils être communiqués aux parents, patients ou aux membres de la famille ? Devraient-ils être notés dans le dossier médical ?
Outre l’activité diagnostique, d’autres applications du WGS/WES pourraient présenter des bénéfices dans le cadre d’une médecine personnalisée, comme notamment l’analyse de variants pharmacogénomiques orientant la thérapie, la détection de statut d’hétérozygotes pour des maladies récessives, l’identification de mutations dans les tumeurs permettant de cibler des stratégies thérapeutiques…
L’utilisation des techniques WGS/WES implique de s’assurer d’une haute qualité d’analyse des données générées avec comme objectif l’utilité clinique pour le patient, et de réfléchir à l’interprétation et à la communication des résultats afin d’assurer au patient une prise en charge optimale et un conseil génétique approprié. Des initiatives pour relever ce défi ont déjà vu le jour :
– EuroGentest (http://www.eurogentest.org/professionals/web/info/public/WP8survey.xhtmland)
– Université de Louvain (Belgique) (http://www.kuleuven.be/metaforum/docs/pdf/wg_14_e.pdf)
– TECHGENE fondé par l’Union Européenne (http://www.techgene.eu)
Pour en savoir plus :
Hastings et al. 2012. The changing landscape of genetic testing and its impact on clinical and laboratory services and research in Europe. Eur J Hum Genet 20:911-616.
Rigter T et al. 2013. Reflecting on earlier experiences with unsolicited findings: points to consider for next-generation sequencing and informed consent in diagnostics. Hum Mutat. 34(10):1322-8.
* NB : Le National Institutes of Health (NIH) va débuter en 2014 dans le cadre d’un programme de recherche le dépistage précoce d’anomalies génétiques chez environ 2000 nouveaux-nés de familles volontaires, par séquençage génome entier.
« Genomic Sequencing and Newborn Screening Disorders »: http://www.nih.gov/news/health/aug2012/nichd-09.htm
Par Anna-Gaëlle Valard
Les tests génétiques fœtaux sur sang maternel : des problèmes éthiques ? Le CCNE dit oui pour le dépistage de la trisomie 21 mais recommande la prudence quant à la généralisation de son utilisation
Le 25 avril 2013, le Comité Consultatif National d’Ethique (CCNE) pour les sciences de la vie et de la santé a rendu public son avis sur les questions éthiques associées au développement des tests génétiques fœtaux sur sang maternel (Avis n°120).
Il s’est penché sur la question en deux temps :
•Quelles questions éthiques particulières soulève l’introduction éventuelle du test fœtal sur sang maternel dans le dépistage anténatal de la trisomie 21?
•Quelles questions éthiques soulève une extension éventuelle du test fœtal sur sang maternel au dépistage prénatal de toute maladie ou handicap d’une particulière gravité et incurable au moment du diagnostic?
Il est compliqué de résumer les réponses du CCNE à ces questions en quelques lignes sans en réduire toute la complexité. En voici donc un résumé quelque peu “étoffé”.
- Test fœtal de trisomie 21 sur sang maternel
La trisomie 21 est une anomalie génomique fréquente (aujourd’hui estimée à 1/2000 naissances en France) et est, à l’heure actuelle, le seul handicap ou la seule maladie d’origine génétique pour laquelle un dépistage prénatal est proposé à toutes les femmes enceintes dès le premier trimestre de grossesse (environ 800 000 par an). Pour rappel, ce dépistage consiste à estimer un risque combiné que le fœtus soit porteur d’une trisomie 21 en se basant sur le dosage sanguin maternel de marqueurs sériques, la mesure échographique de la clarté nucale du fœtus ainsi que l’âge maternel. Si la valeur de ce risque est supérieure à 1/250, alors une amniocentèse ou biopsie du trophoblaste, gestes invasifs comportant des risques de fausse-couche, est alors proposé à la future mère afin d’établir un diagnostic par caryotype.
- Diminution des pertes fœtales dues au processus de dépistage
Dans le cadre du dépistage systématique de la trisomie 21 tel qu’il est effectué actuellement, on estime à 24 000 par an le nombre de femmes enceintes auxquelles est proposé un diagnostic par un examen invasif, avec l’exclusion d’une trisomie 21 dans plus de 9 cas sur 10 mais 80 à 240 pertes fœtales induites par ce geste.
Quant au test sur sang maternel, malgré une sensibilité quasi parfaite (≥ 99% sur les prélèvements interprétables), il oblige tout de même aujourd’hui les professionnels à valider les résultats positifs par un caryotype réalisé sur un prélèvement fœtal, donc invasif en raison du fait que 5% des prélèvements ne sont pas interprétables pour des raisons techniques et qu’il existe quelques faux positifs (taux très faible estimé à 1/500).
Le bénéfice majeur de l’introduction de ce test sur sang maternel, sans danger pour la femme enceinte, comme examen de dépistage de la trisomie 21 reste toutefois évident : le nombre de pertes fœtales liées au dépistage de la trisomie 21 par des gestes invasifs serait considérablement diminué.
2.Un dépistage plus “ciblé”
Le caryotype actuellement effectué pour le diagnostic de la trisomie 21 pose la question de la détection d’altérations chromosomiques “incidentes”, c’est-à-dire qui n’étaient pas initialement recherchées et qui ont été fortuitement identifiées. Non seulement le test fœtal de trisomie 21 sur sang maternel est spécifique à cette pathologie, mais en diminuant le nombre d’examens invasifs et donc de caryotypes fœtaux effectués dans le cadre du dépistage de la trisomie 21, la fréquence du risque de découverte fortuite d’anomalies chromosomiques “incidentes” est également réduite.
- Le test fœtal de trisomie 21 sur sang maternel : oui mais pour qui ?
La question que s’est posé le CCNE est comment intégrer le test fœtal sur sang maternel dans le processus de dépistage de la trisomie 21 : doit-on le proposer aux 800 000 femmes enceintes par an qui bénéficient actuellement de l’estimation du risque combiné ou seulement aux 24 000 femmes dont le risque combiné est supérieur à 1/250?
•La faisabilité technique : Si on décide d’étendre ce test à l’ensemble des femmes enceintes, comment le mettre en place ? Cela nécessiterait des plates-formes ultra-équipées, capables de faire face à un afflux de prélèvements et d’en rendre les résultats dans de courts délais. Est-on en mesure d’assurer le contrôle qualité et l’accréditation de ces plates-formes ?
•La faisabilité économique : Si le test fœtal sur sang maternel était réalisé d’emblée chez les 800 000 femmes enceintes par an, le coût serait de l’ordre d’1 milliard d’euros par an, ce qui ne serait pas sans conséquence sur les dépenses de santé. Le CCNE craint que cela n’aboutisse à une restriction de l’accès aux tests génétiques qui serait aléatoire ou discriminatoire pour certaines populations de patients, avec des conséquences éthiques majeures.
Le CCNE recommande donc des études pilotes avant d’envisager l’extension de ce test à toutes les femmes enceintes.
Le CCNE a également pris en considération les éventuels risques de dérive dans le cas où le test serait proposé de façon systématique à toutes les femmes enceintes et notamment concernant le respect d’une décision libre et éclairée du couple. Il serait alors important de :
(1) S’assurer de la qualité de l’information et du temps laissé à la décision.
Le progrès des tests génétiques entraîne un raccourcissement des délais entre proposition du test et réalisation mais également entre réalisation et résultat. Ceci est un avantage en relation au stress engendré et à la précocité de l’interruption de grossesse si elle est souhaitée mais peut être un inconvénient en termes de délai de réflexion et peut accentuer la dimension “d’urgence” liée au contexte de la grossesse en cours.
(2) S’assurer d’un contexte sociétal “ouvert”.
Le CCNE a tenu a rappelé « la très grande faiblesse de la recherche française sur les handicaps en général, et la trisomie 21 en particulier » et « la persistance dans notre pays (malgré la loi de 2005 sur l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées) d’un défaut majeur dans l’accompagnement et l’inclusion sociale des personnes, enfants et adultes, atteints de handicap ». Le CCNE insiste sur le fait que cette perception négative, notamment dans un contexte toujours plus fort de recherche des “économies de santé” pourrait influencer la décision du couple du fait de la pression sociétale ainsi exercée.
(3) S’assurer de la non-banalisation du diagnostic de la trisomie 21.
La facilité du test fœtal de la trisomie 21 sur sang maternel ne doit pas être un pas supplémentaire vers un risque de “traque” de la trisomie 21 et donc vers une forme d’eugénisme.
Le CCNE est conscient que du fait des progrès attendus du séquençage à très haut débit et de la diminution de son coût, il est très probable que dans un avenir proche, il sera plus simple de proposer l’analyse de l’ensemble du génome fœtal sur sang maternel que de réaliser des analyses ciblées de régions d’intérêt. Il s’est donc interrogé sur l’extension du dépistage à toutes les femmes enceintes et à la lecture du génome fœtal entier.
- Extension, voire généralisation d’une proposition de dépistage anténatal de handicaps et maladies génétiques par séquençagede l’ADN fœtal présent dans le sang maternel
- Pour une extension du diagnostic prénatal à toutes les femmes enceintes
Une extension du diagnostic prénatal (DPN) par un test fœtal sur sang maternel à toutes les femmes enceintes conduirait à effectuer un dépistage en l’absence de signes d’appel échographiques ou d’antécédents familiaux. D’un point de vue éthique, le CCNE se demande en effet si on peut « légitimement ne pas proposer de tels diagnostics prénatals, quand les maladies prédites seraient “d’une particulière gravité et actuellement incurables”, c’est-à-dire qu’elles obéiraient aux prérequis actuels de l’acceptabilité d’une demande d’interruption médicale de grossesse ». En effet, si l’on considère la nécessité d’antécédents familiaux, c’est-à-dire d’avoir connaissance de la naissance d’un enfant malade, pour bénéficier d’un DPN afin que les autres enfants de la famille ne le soient pas, on se heurte au principe de non-malfaisance. De plus, ne pas proposer un DPN, qui est sans risque, à toutes les femmes enceintes s’oppose au principe d’équité. Enfin, le DPN peut alors « être considéré comme préliminaire, au moins dans certains cas, à des soins précoces, et comme préparant à l’accueil d’un enfant différent, lorsque cet accueil est supportable par les parents », ce qui répond au principe de bienfaisance.
- Comment lire le génome fœtal et qu’en communiquer ?
Outre des implications particulières au test anténatal, les questionnements éthiques soulevés d’une manière plus générale par les techniques à très haut débit d’analyses du génome humain dans leurs usages médicaux et sociétaux feront l’objet d’un avis du CCNE en cours de préparation. Dans ce contexte, la question de l’actualisation des données et de leur communication (Quand ? A qui ? Comment ?…) demeurera un point important à définir.
A cette question, le CCNE a considéré les quatre options possibles:
•Un substitut aux tests actuels sans changement des pratiques et en ne divulguant que les résultats qui auraient été ceux des tests ciblés pratiqués actuellement. Dans ce cas, si on préserve alors le droit de ne pas savoir, qu’en est-il du droit de savoir ?
•Communiquer l’ensemble des données. Est-il envisageable de laisser une personne seule devant l’immensité des données que représente une séquence d’ADN génomique total ? Qu’en est-il du droit de ne pas savoir ?
•Cibler, en amont du médecin, la lecture du séquençage global pose le problème du choix de ces régions et de la motivation de ce choix. La mise en place d’une procédure d’élaboration et de révision permanente d’un ensemble de maladies et handicaps d’origine génétique serait envisageable mais le médecin ne serait-il pas alors déresponsabilisé?
•Communiquer le résultat d’une lecture ciblée du séquençage global dont le crible est laissé à la responsabilité du médecin généticien. “Le droit de savoir et de ne pas savoir au cours d’un dialogue singulier qui respecte les principes du choix libre et informé” sont alors conservés. L’évolution si rapide de connaissances pointues et de haut niveau nécessiterait la mise en place de réseaux de compétence afin de maintenir l’expertise des médecins. Ceci mettrait ces spécialistes dans un cadre de responsabilités qui poseraient des problèmes similaires à ceux liés aux responsabilités des échographistes.
- Des défis techniques à surmonter
Si l’on décide de faire une lecture du génome fœtal entier à toutes les femmes enceintes, de grands problèmes techniques sont d’abord à surmonter :
•Le risque de faux positif sera augmenté par le nombre d’anomalies détectables et de ce fait le nombre de confirmations nécessaires du résultat par examen invasif s’en trouverait fortement augmenté.
•La mise en place de plates-formes capables d’assurer, avec toutes les qualités requises, l’analyse d’un grand nombre de prélèvements sanguins serait encore plus complexe que pour le dépistage de la trisomie 21. L’extension à toutes les femmes enceintes impliquerait un bouleversement complet du processus de DPN et de ses structures, sans compter le coût pour nos dépenses de santé.
Une solution a été suggérée sous la forme de tests préconceptionnels mais cela ne ferait que déplacer le problème d’une identification d’un risque du fœtus vers celle d’un risque du couple, avec la possibilité d’interférer dans les unions entre personnes.
- Existe-t-il un risque de glissement vers une forme d’eugénisme ?
A cette question, le CCNE rappelle que les politiques eugénistes, quasi-universellement interdites et condamnées car « reposant sur une violence faite aux personnes et sur un déni de leurs droits fondamentaux, n’ont aucun rapport avec la possibilité offerte aux femmes enceintes de les informer sur la possibilité de réaliser, si elles le souhaitent, un test permettant de détecter d’éventuels risques de handicaps ou maladie graves et incurables auquel serait exposé leur fœtus ».
Toutefois, il reconnaît que pour cela, il est quand même impératif de s’assurer que le choix du couple lors du DPN soit personnel, libre et éclairé afin de ne pas contribuer à une stigmatisation du handicap ou des maladies de particulière gravité. Or, outre les difficultés de faisabilité technique, l’extension des tests génétiques à la lecture du génome entier rendrait cette décision encore plus complexe qu’elle ne l’est déjà.
- Une décision libre et éclairée?
La difficulté de transmettre une information éclairée
•Complexité et grande quantité d’informations.
•Risques d’absence d’accompagnement adéquat du couple dans sa démarche liés à l’ouverture d’un marché proposant des tests en accès libre sur internet.
•Multiplication des anomalies “incidentes”, sans information préalable.
•Multiplication des anomalies de particulière gravité mais de faible probabilité de survenue : Quel seuil de risque choisir pour considérer une interruption de grossesse?
•Limitation du savoir : « Le fait d’être capable de lire la séquence de l’ADN, que ce soit celle du fœtus ou de l’adulte, ne signifie pas du tout que l’on soit en mesure, aujourd’hui, de l’interpréter en totalité en termes d’implications médicales. »
Le risque d’une pression sociétale qui pourrait influencer une décision “libre”
•Le DPN ne doit pas devenir une politique de santé publique imposée.
•Le déficit de la recherche et des structures d’accueil, d’accompagnement et de soin des personnes atteintes de handicap ou de maladie de particulière gravité, déjà évoqué pour le dépistage de la trisomie 21, doit être pallié en France.
•Une information globale doit être faîte pour souligner l’illusion de la possibilité de donner naissance à un enfant qui serait exempt de toute “anomalie” génétique afin de ne pas stigmatiser le handicap et faire en sorte que l’interruption de grossesse ne devienne pas une fin en soi.
- En conclusion
Compte tenu des progrès technologiques de la génétique, le CCNE estime que la question est davantage de savoir comment nous estimons que les tests génétiques fœtaux sur sang maternel devraient être utilisés et régulés que d’imaginer qu’ils pourraient ne pas l’être.
•Respecter le temps du savoir et informer : La problématique de la décision libre et éclairée et donc de l’information tient une place centrale dans la réflexion du CCNE qui estime que cela doit être une des conditions majeures à l’utilisation des tests fœtaux sur sang maternel.
•Proposer le dépistage de la trisomie 21 à partir du séquençage de l’ADN fœtal sur sang maternel : Il constituerait un progrès du dépistage, tel qu’il est pratiqué en France, d’un point de vue éthique et technique. Le CCNE recommande une mise en place chez les femmes à risque après le test de dépistage combiné ainsi qu’une prise en charge du test par la solidarité nationale à supposer que le coût en soit devenu acceptable.
•Accompagner l’extension des prescriptions de tests génétiques fœtaux sur sang maternel : Le CCNE pense que la lecture de l’ADN fœtal entier, lorsqu’elle pourra être réalisée dans des conditions économiques, techniques et éthiques satisfaisantes, devrait être restituée de manière sélective sur des critères pertinents et rigoureux.
•Valoriser ce que la génomique apporte(ra) à la thérapeutique et confronter santé et absence de maladies liées à des anomalies génétiques :Le CCNE insiste particulièrement sur l’importance de la pression sociétale et de l’effort que doit faire la France sur ce point de vue. Il rappelle également que l’absence de toute anomalie génétique est illusoire et qu’il est extrêmement difficile de définir des normes de santé.
Il est du devoir de la société (et de la responsabilité du pouvoir politique pour le mettre en œuvre) de donner aux personnes atteintes d’un handicap ou de maladie, les moyens d’accéder, de manière autonome, au meilleur état “physique, mental et social” possible. Notre conception du rapport entre santé et normalité n’est pas figée et peut-être devrions-nous considérer l’idée que le handicap et la maladie fasse partie de la normalité.
Par Nathalie Delhomme-Duroudier
Quelques petites news dans le monde de la génétique…
Un certain nombre de séminaires et colloques à venir ne manqueront pas de vous intéresser :
7èmes Assises de Génétique Humaine et Médicale
Elles se tiendront du 29 au 31 janvier 2014 au Palais des Congrès de Bordeaux.
Pour en savoir plus : http://www.assises-genetique.org/fr/
13th International Congress on Neuromuscular Diseases (ICNMD)
Date : 5-10 juillet 2014
Lieu : Nice, France
Pour en savoir plus
3èmes jeudis de Necker
Les 3emes jeudis de Necker ont lieu le 3eme jeudi de chaque mois à l’hôpital Necker. Ces réunions sont organisées par l’association française de génétique clinique et de conseil génétique. Voici le programme 2013-2014 :
•19 septembre : Journée Best off «spécialejeunes » (Alain Verloes)
•17 octobre : Génétique et épilepsie (Delphine Héron, Gaétan Lesca)
Après-midi : CLAD Marseille-Nice
•21 novembre : Déficits immunitaires héréditaires (Capucine Picard)
Après-midi : CLAD – Centre-Est
•19 décembre : Le point sur les cellules souches (Valérie Cormier-Daire, Dominique Bonneau)
Après-midi : CLAD- Nord
•29-31 janvier : Assises de génétique à Bordeaux
•20 février : Maladies pulmonaires rares de l’enfant (Christophe Delacourt, Alice Hadchouel)
Après-midi : CLAD – Est
•20-21 Mars : Séminaire Pierre Royer
•17 avril : Diagnostic prénatal : cardiopathies congénitales (Sylvie Odent, Damien Bonnet)
Après-midi : CLAD- Ouest
•15 mai : Maladies génétiques et dents (Didier Lacombe)
Après-midi : CLAD- Ile-de-France
•19 juin : Place des innovations technologiques dans le diagnostic de routine (Laurence Faivre, Jean-Baptiste Rivière)
Après-midi : CLAD- Montpellier
Si vous avez connaissance d’un colloque, un séminaire, une formation, une association de patients… dont vous souhaiteriez nous faire partager l’intérêt dans la prochaine newsletter, n’hésitez pas à contacter Nathalie DELHOMME-DUROUDIER à l’adresse nathalie.deld_cg@hotmail.fr.
Quelques news en bref
Publication du rapport d’activité 2012 de l’ABM
L’Agence de la biomédecine (ABM) a publié son rapport d’activité 2012. Parmi les faits marquants, on note le lancement du plan greffe 2012-2016, la mise à disposition du guide d’inspection des activités de génétique constitutionnelle, l’inscription du 200 000me donneur sur le registre des volontaires au don de moelle osseuse, et la publication de textes relatifs à l’assistance médicale à la procréation et au don de gamètes. Comme tous les ans, le rapport fait également le bilan des activités de diagnostic prénatal, de diagnostic préimplantatoire, et de génétique postnatale.
Le rapport est disponible à cette adresse : http://www.afdphe.org/sites/default/files/bilan_activite_2012.pdf
Publication du rapport d’activité 2012 de l’AFDPHE
L’Association française pour le dépistage et la prévention des handicaps de l’enfant (AFDPHE) a publié son rapport d’activité 2012.
En 2012, sur 836 079 nouveau-nés (France métropolitaine et DOM/TOM), 906 malades ont été repérés soit 1 / 923 nouveau-nés, avec les différences de fréquence habituelles selon les affections
40 ans de dépistage néonatal en France : le nouveau site de l’AFDPHE
Pour son 40ème anniversaire, l’AFDPHE avait organisé le 10 janvier 2013 un colloque au ministère de la Santé, qui avait permis de faire un état des lieux de 40 ans de dépistage néonatal en France. L’occasion de souligner que ce programme qui s’est étendu progressivement à cinq maladies rares et graves, sans signes cliniques extérieurs présents à la naissance (la phénylcétonurie, l’hypothyroïdie congénitale, l’hyperplasie congénitale des surrénales, la drépanocytose et la mucoviscidose), avait bénéficié à près de 30 millions de nouveau-nés. Ainsi depuis 40 ans, toute personne née en France métropolitaine et en outre-mer bénéficie de ce dépistage (soit près de la moitié de la population française), et 19 000 enfants ont pu être repérés et pris en charge de manière précoce et efficace, avant l’apparition de signes cliniques irréversibles.
L’occasion aussi pour le site de faire peau neuve, avec une version plus ergonomique et plus claire. On y trouve notamment des documents spécifiques pour les professionnels, des documents destinés aux parents avec des informations sur les maladies dépistées et les modalités pratiques du dépistage, et les résultats annuels de celui-ci.
Cependant, et dans les perspectives du dépistage néonatal en France, si on se réfère à l’action A-1-6 du plan national Maladies rares 2011-2014, deux éléments restent en suspens :
La mise en œuvre de la recommandation de la Haute autorité de santé (HAS) de juin 2011 de réaliser le dépistage du déficit en acyl-CoA déshydrogénase des acides gras à chaine moyenne (MCAD). La liste des maladies soumises à dépistage néonatal doit être fixée par arrêté du ministre chargé de la santé après avis de l’Agence de la biomédecine (article R1131-21 du code de la santé publique).
L’avis de la HAS sur la généralisation du dépistage de la drépanocytose qui reste pour l’instant ciblé, et sur la prise en charge des hétérozygotes, ainsi que son avis sur l’extension du dépistage à d’autres erreurs innées du métabolisme que le déficit en MCAD.
Lire le dossier des 40 ans : http://www.afdphe.org/lafdphe-f%C3%AAt%C3%A9-40-ans-de-d%C3%A9pistage-n%C3%A9onatal-0
Une nouvelle directrice de projet pour le Plan national Maladies rares 2011-2014
Dominique Peton-Klein, médecin général de santé publique, a été nommée directrice de projet auprès du directeur général de l’offre de soins, chargée notamment du suivi et de l’évaluation du plan national maladies rares 2011-2014, par arrêté du Premier ministre et de la ministre des Affaires sociales et de la Santé en date du 8 juillet 2013. Dans ses fonctions précédentes, outre des fonctions de directions (DDASS, DRASS, ARH), elle a notamment été en charge de la gestion des risques et de la sécurité sanitaire, puis des politiques de santé et de protection sociale pour les détenus.
Publication du rapport final sur le bilan du Plan cancer 2009-2013
La Direction générale de la santé (DGS) qui a présidé le comité interministériel de pilotage du Plan cancer 2009-2013, a publié fin août 2013 avec l’appui de l’Institut National du Cancer (INCa), un rapport final sur le bilan du Plan cancer 2009-2013, faisant notamment le point sur la prise en charge des cancers rares.
Pour en savoir plus : http://www.plan-cancer.gouv.fr/accueil/actualites/43-actualites/1204-publication-du-rapport-final-au-president-de-la-republique-du-plan-cancer-2009-2013.html
Mémo de la CNSA sur le pilotage de la mise en œuvre du schéma national d’organisation sociale et médico-sociale pour les handicaps rares 2009-2013
En juillet 2013, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) a édité un mémo sur la mise en œuvre du schéma national d’organisation sociale et médico-sociale pour les handicaps rares 2009-2013.
Lire le mémo : http://www.cnsa.fr/IMG/pdf/Memos23-WEB.pdf
Publication d’une fiche mémo par la HAS sur les troubles causés par l’alcoolisation fœtale
La Haute autorité de santé publie une fiche mémo “Troubles causés par l’alcoolisation fœtale : repérage”. Elle vise à aider les professionnels de santé à repérer et à orienter :
les femmes enceintes susceptibles d’avoir un problème de consommation d’alcool et dont l’enfant risque d’être atteint de troubles causés par l’alcoolisation fœtale ;
les enfants à risque susceptibles d’avoir subi les effets d’une exposition prénatale à l’alcool.
Actualités des associations
EURORDIS TV : une nouvelle chaîne multilingue
La nouvelle chaîne EURORDIS TV diffuse des vidéos sur les maladies rares en plusieurs langues. Lancée en avril 2013, EURORDIS TV a déjà attiré 16 500 visiteurs. A ce jour, plus de 1 300 heures de vidéos ont été visionnées. Plus de 250 vidéos sont disponibles.
Le slogan du Forum maladies rares choisi par les internautes : « Partageons pour être plus forts ! »
Le Forum maladies rares fête son premier anniversaire. A cette occasion, les internautes ont été invités à proposer le slogan de ce service qui propose la création de communautés en ligne aux personnes touchées par une maladie rare.
Le slogan retenu est : Partageons pour être plus forts !
Le projet JADE donne la parole à des jeunes en situation d’aidant de leur parent malade
Le projet JADE, Jeunes AiDants Ensemble, est une initiative du Réseau Soins Palliatifs et de Support en Essonne Sud (SPES) et de l’Association Française des Aidants qui vise à donner la parole à des jeunes en situation d’aidant de leur parent malade et à leur donner de la visibilité. L’enjeu est de mieux comprendre ce que vivent ces jeunes afin de leur proposer ensuite des outils qui amélioreront peut-être leur situation.
Plusieurs actions sont en développement dont :
Le tournage d’un film documentaire par Isabelle Brocard (voir l’appel à témoin dans l’orphanews de novembre 2013).
La mise en place d’ateliers d’expression artistique qui constitueront également un répit pour ces jeunes puisque le dispositif propose de les remplacer auprès de leur parent si besoin.
Afin de mener à bien ces actions le projet JADE a besoin de repérer des jeunes de manière urgente.
Par Nathalie Delhomme-Duroudier